Littérature Afro ☀ 

Regard sur la Journée Internationale de l’Enfant Africain

https://www.africardv.com/societe/togo-des-jeunes-de-12-34-ans-pour-la-generation-2030/

Chaque année le 16 juin, est commémorée la journée internationale de l’enfant africain ou Journée de l’Enfant Africain (JAE) en souvenir au massacre d’élèves lors de la révolte de Soweto en 1976 . C’est une célébration instituée en juillet 1990 par l’Organisation de l’Union Africaine (OUA) devenue l’Union africaine (UA), à travers sa Charte Africaine des Droits et du Bien-être de l’Enfant (CADBE)

 

Un rappel historique pour commencer 

Comprendre la Journée de l’Enfant Africain c’est remonter au 16 juin 1976. L’Afrique du Sud subissait depuis plusieurs années déjà, un système d’apartheid qui contraignait les Noirs à vivre presque qu’en état d’esclavage dans leur pays. En réponse à l’intention du gouvernement d’imposer l’Afrikaans comme langue d’apprentissage obligatoire, des élèves ont organisé et mené des marches de protestation pacifiques qui se sont malheureusement terminées en carnage policier, avec près de 600 personnes tuées.

Quelques figures importantes de cette fatidique journée sont:

  • Teboho “Tsietsi” Mashinini (1957 – 1990) : il a été le président du Conseil Représentatif des Élèves de Soweto, et a mené les marches de protestation du 16 Juin 1976. Il est décédé en exil.
  • Sam Nzima (1934 – 2018) : il est l’auteur de la célèbre photographie du 16 Juin 1976 montrant un des premiers élèves tombés sous les balles des policiers et secouru par son camarade.
  • Hector Pieterson (1963 – 1976) : à seulement 13 ans, il est devenu la figure mondiale du massacre de Soweto. Il est l’une des premières victimes des balles policières, décédé sur le terrain.
  •  Mbuyisa Makhubu : il est l’élève qui a porté secours à Hector Pieterson, victime des tirs policiers. Forcé de s’exiler après cette journée, personne ne sait ce qu’il est devenu.

Pour défendre leur droit à une éducation de qualité, des centaines d’enfants ont trouvé la mort dans les rues de Johannesburg. La journée internationale de l’enfant africain interpelle principalement la qualité de l’éducation et du traitement des enfants sur le continent, et est une occasion de réflexion sur l’amélioration de la vie et l’éducation des enfants en Afrique.

 

Célébration de la 32e édition de la Journée de l’Enfant Africain (JEA)

Le thème cette année est : « Élimination des pratiques néfastes affectant les enfants : Progrès sur les politiques et pratiques depuis 2013 ».

Rappelons qu’en 2013,  le Comité Africain d’Experts sur les Droits et le Bien-être de l’Enfant (CAEDBE) avait porté les discussions de la 23e journée de l’enfant Africain sur « l’élimination des pratiques sociales et culturelles néfastes affectant les enfants : notre responsabilité collective« . L’objectif majeur était de sensibiliser les gouvernements à éliminer les traitements préjudiciables affectant les enfants. Les participants à ces discussions dont l’Egypte, le Kenya, le Cameroun, la Gambie, l’Ethiopie, le Mozambique et la Zambie, ont adopté une  Déclaration portant spécialement sur l’élimination des pratiques sociales et culturelles néfastes en Afrique.

La 32e édition de la JEA est donc un appel à évaluer l’avancement des résolutions prises par les États pour l’élimination effective des pratiques néfastes affectant les enfants en Afrique.

Le Protocole à la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples relatif aux Droits des Femmes en Afrique (Protocole de Maputo) en son article 1er, définit les pratiques néfastes comme « tout comportement, attitude et/ou pratique qui affecte négativement les droits fondamentaux des femmes et des jeunes filles, tels que le droit à la vie, à la santé, à l’éducation, à la dignité et à l’intégrité physique ».

Les pratiques néfastes sont généralement des pratiques acceptables et souvent imposées par la famille, la communauté, les traditions, tels que le mariage des mineurs, le mariage forcé des filles, le trafic sexuel, les châtiments corporels, les rites d’initiation violents, ou encore l’enrôlement des mineurs dans les forces armées. 

Depuis 2013, des avancées notables ont été enregistrées, bien que beaucoup reste à faire :

Des défis immenses persistent…

Les gouvernements africains doivent fournir plus d’efforts en statuant clairement dans leurs constitutions, lois et procédures judiciaires, des dispositions pour l’élimination des pratiques néfastes, comme l’ont fait des pays comme le Ghana, le Malawi ou encore l’Ethiopie. En outre, seuls 50 pays ont ratifié la Charte Africaine sur les Droits et le Bien-être de l’Enfant (CADBE). Le Botswana, l’Egypte, la Mauritanie et le Soudan trainent encore le pas. 

D’après la CEDEF (Convention sur l’Elimination de toutes les formes de Discrimination à l’Egard des Femmes), une fille sur quatre est mariée avant l’âge de 18 ans dans la plupart des pays africains. Les mutilations relatives aux pratiques traditionnelles et les châtiments corporels (notamment dans les écoles) continuent d’être pratiqués et restent souvent impunis faute d’encadrement légal. Seuls neuf pays africains ont interdit les châtiments corporels dans tous les milieux. La pandémie actuelle de la COVID-19 semble aussi fournir un environnement propice à ces pratiques. Une récente évaluation indique par exemple que 31 % des membres des communautés de la Somalie ont déclaré que les incidents liés à l’excision avaient augmenté par rapport à la période pré-COVID-19.

Des formes émergentes de travail et d’exploitation sexuelle des enfants en ligne et dans le domaine du tourisme ont également vu le jour. Les estimations de l’Organisation Mondiale du Travail de 2016 indiquent qu’un enfant sur cinq en Afrique est concerné par le travail des enfants, tandis que neuf pour cent sont impliqués dans des travaux dangereux ( travail dans des mines) principalement en Afrique subsaharienne.

Les pratiques néfastes influencent négativement les droits à la santé et à l’éducation des enfants africains. Les abandons scolaires, les expulsions forcées, l’ignorance sur la santé sexuelle entraînant des grossesses non désirées, des infections sexuellement transmissibles, sont autant de conséquences de ces pratiques. 

 

Continuer les réflexions et accélérer les actions sur le terrain…

La situation actuelle de l’enfant africain semble alarmante. S’il est vrai que les politiques doivent réellement se mettre à la tâche et implémenter des lois et règlements protégeant les enfants en Afrique, il n’en demeure pas moins que la société entière est tout autant responsable et a un rôle important à jouer. L’adage africain le dit si bien «Il faut tout un village pour élever un enfant ».

L’éducation et la protection devraient être systématiques dans les cercles familiaux et les communautés. Toute culture est évolutive. Il revient aux membres de cette culture de s’assurer qu’elle conserve les valeurs qui sont les siennes. Les dirigeants traditionnels (et culturels) devraient décourager les pratiques préjudiciables comme l’excision, le mariage forcé. En bannissant ces actes préjudiciables de nos cultures et coutumes, nous pourrons ainsi « accéder à la modernité sans piétiner notre authenticité » ( Léopold Sédar Senghor).

Une sensibilisation régulière et constante sur les fléaux grandissants de notre société est aussi de mise. Parfois, ils sont la conséquence de pratiques néfastes subies par les enfants : 

  • L’addiction à la drogue en milieux scolaires et estudiantins.
  • Les migrations aventureuses vers les pays occidentaux ou arabes en utilisant des moyens dangereux et clandestins. Les enfants en déplacement sont confrontés à des défis tels que la discrimination, les arrestations arbitraires, la détention et l’expulsion, la perte d’identité, de nom et de nationalité, le manque d’accès à l’éducation, l’exploitation sexuelle.
  • L’enrôlement dans des milices armées principalement dans les pays enlisés dans les guerres civiles depuis des années.

Ensemble, les gouvernements, les leaders d’opinion civils et traditionnels africains doivent travailler à procurer à l’Enfant Africain, un environnement propice et digne dans lequel il pourra pratiquer les valeurs chères à notre authenticité. Ces valeurs de courage, d’abnégation, de force au travail, de témérité parfois semblent perdues. Mais la bravoure et le sacrifice des enfants de Soweto restent un constant rappel pour les générations présentes et futures : les défis doivent être pris à bras le corps, rien ne peut changer dans l’inertie et la complaisance.

 

De l’espoir !

En dehors des actions ambitieuses attendues des gouvernements, des héros contemporains existent autant sur le continent qu’à l’international, et participent à inspirer les générations actuelles. Ils excellent dans des disciplines sportives, sont des génies de création ou encore des hommes et femmes politiques complètement dédiés au développement de leurs pays. 

L’Enfant Africain est en constante mutation. Pour maintenir cette constante positive, des solutions seraient :

  • Accentuer des actions (privés ou publics) de sensibilisation et d’éveil à la connaissance et l’acceptation de l’histoire de l’Afrique par ses enfants, 
  • Encourager les jeunes à se réapproprier leur authenticité et s’affirmer en affrontant les défis internationaux,
  • Développer et encourager des actions d’entrepreneuriat, moyen important de développement économique et de lutte contre la pauvreté.

Dan Montsitsi, co-organisateur de la révolte de Soweto, avait dit : « Ce que le 16 juin a fait, c’est mettre le feu aux poudres. Tout ce que nous avons fait, c’est allumer la mèche qui a fait exploser l’Afrique du Sud». Que la flamme de cette mèche ne s’éteigne jamais, et fasse exploser le génie africain et la volonté de créer un environnement meilleur pour les générations futures. 

Article rédigé par Elisabeth KG

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